
Lorna Shore – I Feel The Everblack Festering Within Me
L’éternel pourpre du désespoir : Lorna Shore poursuit son exploration de l’obscurité abyssale.
Trois ans après Pain Remains, Lorna Shore plonge à nouveau dans les tréfonds de l’âme avec I Feel The Everblack Festering Within Me. L’album, attendu avec une certaine appréhension, ne se contente pas de reproduire le succès monumental de son prédécesseur. Au lieu d’une reinvention, il intensifie son univers sombre et oppressant, l’alourdissant d’une atmosphère étouffante et inévitable.
Dès les premières notes, la musique vous saisit. Des orchestrations pesantes, fusionnées avec des riffs et des percussions, vous engloutissent comme une marée dévastatrice. Chaque impact sonore, chaque accord, résonne comme un effondrement intérieur. Alors que Pain Remains laissait parfois filtrer une fragile lueur, ce nouvel album ferme hermétiquement toutes les issues, vous emprisonnant dans une spirale d’angoisse suffocante.
« Prison Of Flesh » illustre parfaitement cette mécanique : une montée progressive de tension, puis un déchaînement sonore hypnotique qui vous aspire. « Unbreakable » propose une variante, toujours brutale mais ponctuée de mélodies fugaces, de brèves étincelles dans le chaos. Lorna Shore ne se contente pas de la violence pure, elle l’imprègne d’émotions. « Forevermore », sans doute l’un des titres les plus marquants, allie rage et une forme de solennel presque tragique. Les orchestrations atteignent une grandeur cérémonielle, comme si chaque note était chargée d’un poids funèbre. Une tempête émotionnelle où le désespoir se mêle à une beauté glaciale.
Les textes, miroir de cette suffocation intérieure, explorent les luttes intérieures, la perte et la douleur. Un besoin d’exorcisme viscéral s’exprime sans jamais se fixer sur un concept précis. Will Ramos, avec une intensité rare, incarne parfaitement cette rage : des graves tonitruants, des cris déchirants, une voix qui explore les limites pour servir un combat sans fin.
L’homogénéité du disque est impressionnante. Les éléments, autrefois parfois impénétrables, trouvent maintenant une cohérence parfaite. Les orchestrations n’atténuent pas la brutalité, au contraire, elles l’amplifient. Le résultat : un album d’une densité remarquable, qui révèle ses multiples facettes au fil des écoutes, mais qui risque d’épuiser ceux qui attendaient plus de respiration.
Un pas de plus dans l’obscurité, donc. Plus long, plus dense et plus ambitieux que ses prédécesseurs, I Feel The Everblack Festering Within Me divisera certainement l’opinion. Un sommet pour certains, une œuvre étouffante pour d’autres. Impossible d’y rester indifférent. Cet album sans concession confirme la domination de Lorna Shore sur sa scène. D’abord écrasant, il révèle une richesse insoupçonnée, s’imposant comme un accomplissement majeur, la preuve que le groupe avance avec une vision claire et sans peur.