Chroniques

Atsuko Chiba – Water, It Feels Like It’s Growing (2023)

Pays : Canada
Style : Rock psychédélique
Note : 7/10
Date de sortie : 13 janvier 2023
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Originaire de Montréal, au Québec, ce groupe inclassable navigue entre le rock psychédélique, le post-rock et le rock progressif, avec l’incorporation occasionnelle d’autres sons. Il y a beaucoup de Pink Floyd psychédélique épique de la vieille école sur l’ouverture Sunbath, mais cela finit par rappeler King Gizzard and the Lizard Wizard, avec des voix répétitives, presque rituelles, une comparaison qui se poursuit dans la chanson suivante, So Much For, qui fait un de ces voyages latéraux dans un autre genre, à savoir le funk. Il faut dire que les King Gizzard sont aussi des sauteurs de genre notoires, il n’est donc pas vraiment surprenant de les entendre autant ici.

J’aime ces ouvertures, mais Atsuko Chiba m’a accroché sur Shook (I’m Often) et a souligné à quel point ils sont bons sur Seeds. La première arrive de manière glorieuse et j’aimerais pouvoir expliquer ce qu’ils font. Je pense que le son est généré par des claviers, mais il pourrait être en collaboration avec une guitare. Il rappelle plus Vangelis que les Floyd, mais il ondule comme s’il était vivant, un essaim de méduses sensibles et bourdonnantes flottant dans l’espace, avec la voix de Karim Lakhdar (je suppose), un passant fasciné, grâce à un effet sur sa voix qui est un clin d’œil au space rock.

Il y a très peu de voix sur Shook (I’m Often), mais elles sont répétées et aident à nous bercer dans le groove de la chanson. Seeds a plus de paroles, mais c’est aussi une chanson plus longue, qui approche les huit minutes. Cet écho désincarné est toujours là au début, sur un fond de synthétiseur pulsé, et tout se construit merveilleusement. Il ne se passe pas grand-chose pendant la longue section instrumentale de la seconde moitié, mais je n’ai pas été aussi captivé par un morceau de musique depuis longtemps. C’est un rêve séduisant, hypnotique et psychédélique qui se termine par des cordes sauvages, comme si le Kronos Quartet enregistrait à côté et qu’il était entré en scène pour assurer le final.

Comme s’ils ne savaient pas comment suivre Seeds, mais ne voulaient pas terminer l’album sur cette note, il serait juste de qualifier Link de réponse presque conventionnelle, son titre étant probablement représentatif de ce qu’il fait ici. Il s’agit d’une chanson bien plus importante que les deux précédentes et elle est furieuse, la basse persistante de David Palumbo nous menant toujours plus loin, mais le chant de Lakhdar (encore lui, je présume) se déchaîne sur nous de manière post-punk. C’est du Talking Heads lourd, un Cake plus antagoniste. Et c’est fait en deux minutes et demie, parce que le coup de gueule est terminé.

C’est le titre qui conclut l’album, la chanson la plus longue d’une seconde. Ce n’est certainement pas un retour à Seeds, qui augmente le psychédélisme et ajoute une section narrative trippante au milieu. C’est bien joué et c’est une conclusion décente pour l’album, mais on a l’impression qu’il essaie un peu trop fort, alors que Shook et Seeds semblent avoir grandi de façon plus organique dans leur forme finale. Je me suis rendu compte que, même si j’appréciais le morceau titre, j’avais l’esprit ailleurs pour revisiter ces morceaux antérieurs.

Je devrais probablement mentionner qu’Atsuko Chiba est la protagoniste d’un anime de science-fiction intitulé Paprika, que je n’ai pas vu mais que je devrais clairement voir, parce que c’est un Satashi Kon et que j’apprécie Perfect Blue depuis des décennies. C’est une psychologue qui pénètre dans les rêves des gens à l’aide d’un appareil appelé DC Mini, l’alter ego du titre. Et cela ressemble plutôt au morceau de clôture. C’est une chanson chaotique et il peut être utile d’imaginer que Paprika nous aide à lui donner un sens.

C’est mon premier album d’Atsuko Chiba et j’ai bien l’intention de retrouver les deux précédents, Jinn en 2013 et Trace en 2019, pour voir d’où vient ce son. Tout ce que je sais à ce stade, c’est ce que j’ai entendu ici, plus le fait qu’ils sont un groupe de cinq avec deux guitaristes qui jouent des synthés et un troisième qui fait la même chose à l’envers. Un quatuor à cordes et une section de cuivres contribuent également à leur toile de fond sonore, bien qu’ils soient rarement évidents, leurs contributions s’intégrant parfaitement au son existant.