Chroniques

Doomsday Astronaut – Djent Djinn (2023)

Pays : Roumanie
Style : Métal progressif
Note : 7/10
Date de sortie : 30 Aug 2023
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J’ai chroniqué plusieurs albums de Waqas Ahmed, un guitariste pakistanais vivant à Sibiu, en Roumanie, mais le plus ancien d’entre eux est un album de 2020 intitulé Doomsday Astronaut. Eh bien, ce nom est de retour, cette fois en tant que marque d’Ahmed. Je parle de marque plutôt que de groupe, car il est le seul musicien ici pour la plupart, Marius Stremtan apportant des solos de guitare supplémentaires sur quelques morceaux et Roxana Amarandi un solo de violon sur Yojimbo Unleashed. Tout le reste, qu’il s’agisse des guitares qui ont fait sa renommée, de la basse, des claviers ou de la batterie, est l’œuvre d’Ahmed lui-même.

Jusqu’à présent, mon album préféré d’Ahmed a été l’album Alpha Q de l’année dernière, qui était le fruit d’un travail de groupe, le Marius Stremtan d’ici étant vraisemblablement le Marius d’là-bas. Pour moi, il joue bien parce qu’il trouve un son cohérent et qu’il fait preuve d’imagination. La guitare est une force magnifique sur cet album, tissant des histoires même sans le bénéfice d’une voix, chacun des cinq morceaux plus l’intro étant résolument instrumental.

L’une des réussites est que chacun de ces morceaux trouve sa propre voix, même si leur son est cohérent avec ceux qui les entourent. La guitare d’Ahmed joue sur le même ton sur Awaken the Pharaoh, par exemple, que sur Yojimbo Unleashed avant lui et Groove Monkey après lui, mais elle raconte une histoire différente, que ce soit en raison de la sensation ethnique qu’elle génère par moments, soutenue par les claviers et le violon, ou en raison de certaines sections imaginatives comme la section lente vers la fin. Yojimbo Unleashed est plus simple, la guitare retrouvant presque le bourdon d’une cornemuse à certains moments alors qu’elle prend le temps de jouer moins de notes pour avancer, et Groove Monkey apporte une véritable attitude avec lui, comme le morceau le plus ouvertement « regardez-moi » ici.

Une autre réussite est que, même si tous ces morceaux utilisent les mêmes ingrédients mais évoquent un plat entièrement nouveau, il est difficile de choisir un favori parmi eux. J’aime ces trois titres, mais pour des raisons différentes. Yojimbo Unleashed est le plus simple d’entre eux, mais il possède le balayage le plus élégant sur une conduite cohérente, comme si ce joueur de cornemuse se tenait au sommet d’un train à vapeur qui traversait la campagne, les notes se maintenant dans son sillage. Comme il s’agit du samouraï du titre, il lui faudra des mains supplémentaires pour manier le bâton et jouer de la cornemuse, mais il en semble tout à fait capable.

Awaken the Pharaoh nous emmène dans un endroit exotique et nous présente de petites histoires tout en nous faisant visiter les lieux. Il s’agit davantage d’une suite que d’une pièce unique, et elle nous entraîne dans un véritable voyage. L’idée est qu’un pharaon a été ramené à la vie après cinq mille ans et le choc culturel qu’il doit subir en voyant les changements apportés à son royaume est présent dans la technologie et la mise à jour claire de vieux thèmes. D’une certaine manière, cela m’a rappelé Beethoven jouant dans le centre commercial du San Dimas moderne dans Bill &amp ; Ted’s Excellent Adventure. C’est à la fois ancien et nouveau.

Groove Monkey a un côté impertinent et funky qui rappelle beaucoup Steve Vai. C’est un morceau qui se donne en spectacle, mais Ahmed a les capacités de soutenir cet aspect de recherche d’attention. Il y a des moments dans l’album où il déchire clairement, mais la plupart du temps il évite de simplement lancer autant de notes qu’il est humainement possible de le faire, en faveur de la création de textures. La plupart de ces textures sont créées à la guitare, mais il utilise aussi les claviers avec beaucoup de succès, sans qu’ils ne prennent jamais le dessus.

Et si ces trois titres se prêtent si facilement à la comparaison, sonnant de manière cohérente mais aussi complètement différente, il y en a deux autres qui les accompagnent. La même chose s’applique à eux, mais pas autant.

Born of Smokeless Fire est le morceau le plus long de l’album, avec un peu plus de sept minutes, et il met le groupe en mouvement de manière très efficace, tout en étant un résumé de ce qui reste à venir. Il y a une section lente au bout de cinq minutes qui fait allusion à Yojimbo Unleashed et un changement juste après qui montre la voie vers Awaken the Pharaoh, mais, après avoir mis ces idées en mouvement, il se contente de passer à autre chose sans faire grand-chose pour les explorer. C’est à cela que servent les dernières pistes, et elles le font de manière substantielle.

Premonition conclut l’album et change de ton pour la première fois, un morceau plus introspectif qui fonctionne comme un instrumental à laisser couler sur nous, mais qui semble aussi devoir fonctionner comme une danse. Il s’agit de mouvement, comme c’est souvent le cas dans la musique d’Ahmed, mais à une échelle beaucoup plus subtile que tout le reste de l’album. Pendant une bonne partie de cet album, il ressemble beaucoup plus à Gary Moore qu’à Steve Vai, par exemple, et c’est une bonne façon de conclure un album.

D’ailleurs, je dis « album » mais celui-ci est un peu court, une minute et demie de moins que la durée de Reign in Blood, qui est ma référence pour un album court, puisqu’il est apparu en entier sur chaque face de sa cassette. Et c’est là le défaut le plus évident. Un autre morceau pour dépasser la demi-heure aurait permis d’éviter cela, mais si c’est son plus gros problème, c’est un album solide.