Chroniques

Edena Gardens – Agar (2023)

Pays : Danemark
Style : Space Rock
Note : 8/10
Date de sortie : 7 Apr 2023
Sites : aucun

Voici quelque chose de fascinant que j’ai trouvé étiqueté comme étant du space rock. Je ne vais pas dire que ce n’est pas un album de space rock, parce que ça l’est vraiment, mais ce n’est pas comme on pourrait s’y attendre. Ce n’est pas Hawkwind. Je pourrais tout aussi bien le qualifier de rock psychédélique, de rock progressif ou même, de manière plus appropriée, de jazz cosmique. On a vraiment l’impression d’être emmené là-haut, très loin, mais on n’est pas dans un vaisseau spatial voyageant en ligne droite. Nous sommes dans un maelström cosmique, ballotés dans tous les sens, mais d’une manière étrangement délicieuse.

Je vois Edena Gardens décrit comme un supergroupe, ce qui est sans doute le cas si l’on restreint ce terme à un cadre assez restrictif de musiciens qui enregistrent pour El Paraiso Records. Il s’agit d’un label danois, créé par Jonas Munk et Jakob Skøtt du groupe de rock psychédélique Causa Sui, et il s’agit d’un projet parallèle de ce dernier. Je n’ai pas entendu Causa Sui, bien que cela me dise que je devrais le faire, mais j’entends beaucoup de jazz dans son interprétation. Il porte clairement sa casquette de jazz lorsque Forst démarre l’album, mais il passe progressivement à un mode rock, aidant finalement à canaliser les premiers King Crimson pour un final particulièrement expérimental, Crescent Helix.

Le guitariste est Nicklas Sørensen, qui joue de la guitare pour le groupe de krautrock Papir, mais qui a également sorti un album en collaboration avec Munk. Je n’ai pas entendu Papir non plus, mais j’ai souvent entendu « trompeusement minimaliste » lors de mes recherches sur le groupe, ce qui explique son approche de la guitare ici. Il ne reste plus que Martin Rude, un multi-instrumentiste qui joue dans une multitude de projets avec Skøtt, dont le Martin Rude &amp ; Jakob Skøtt Duo, le Rude Skøtt Osborn Trio et le London Odense Ensemble. Je suppose qu’il s’occupe ici de la basse, mais il est fort possible qu’il joue aussi d’autres instruments.

Ce qu’ils évoquent ici sur leur deuxième album est quelque chose de vraiment immersif. Je ne sais pas si l’une des huit chansons proposées a été improvisée ou non. Je suppose qu’elles ne l’ont pas été, mais il semble tout à fait possible qu’elles l’aient été. Quoi qu’il en soit, elles évoquent des paysages sonores dans lesquels on peut simplement plonger. Il s’agit moins de chansons que d’ambiances à porter comme l’eau d’une douche. La pochette peut laisser penser que tout est sombre et tumultueux, mais ce n’est pas toujours le cas et rarement le cas. Sombra del Mar ressemble à une journée grise dans laquelle le soleil a soudainement décidé de s’immiscer. The Veil est un doom lent, presque comme un instrumental de Pink Floyd enregistré à 45 tours mais joué à 33.

Comme on peut s’y attendre, votre morceau préféré ici – et je dois souligner que tout ce qui est proposé est entièrement instrumental – sera probablement celui qui résonnera le plus en vous. En ce qui me concerne, bien que je les qualifie toutes de fascinantes, c’est Montezuma qui se démarque. C’est un autre morceau lent, mais c’est un délicieux exercice de contrastes. La basse est basse et résonne comme si elle était coincée dans une fosse sous-marine, résonnant avec le doux mouvement des vagues. Cependant, la guitare trouve des sonorités magnifiques, comme si elle surfait sur un lac étendu au-dessus de cette fosse. D’une certaine manière, nous voyons les deux à la fois parce que les six titres précédents d’Edena Gardens nous ont ouvert le troisième œil ou quelque chose comme ça.

Je n’ai aucune idée des influences du groupe, mais j’entends beaucoup de sons différents ici. D’un côté du spectre, j’entends des groupes de drone metal comme Sunn O))) dans le socle de chansons comme The Veil, mais Montezuma ne fait qu’y faire allusion, dérivant davantage vers le travail de guitare primal de Neil Young lorsqu’il a fait du rock pendant un certain temps mais a ensuite décidé de s’adoucir. Au plus apaisant du groupe, j’entends Pink Floyd, surtout dans les claviers, mais les guitares n’ont rien à voir avec Dave Gilmour. Le nom que je citerais est celui de Bill Frisell, si l’on se souvient de son travail avec Robin Holcomb et Wayne Horvitz sur la compilation Rubáiyát pour commémorer les 40 ans d’Elektra Records.

Mais les choses sont loin d’être aussi simples. On y trouve du post-rock, du rock alternatif et du stoner rock. Une grande partie pourrait être décrite comme du prog rock, qui passe au jazz et vice-versa, ou du krautrock, qui couvre les deux à la fois. Comment décrire autrement Ascender, qui ressemble à des couches d’eau s’écoulant sur un fascinant jeu de roulements de tambour ? Et c’est du rock psychédélique avant tout, quelque chose qui, à mon avis, vaut la peine d’être écouté avec un bon casque dans l’obscurité. Bien sûr, le genre n’a pas d’importance. En fin de compte, quel que soit le nom qu’on lui donne, c’est un joyau pour tous ceux qui aiment s’immerger dans des paysages sonores.

Et maintenant, je veux me plonger dans le catalogue d’El Paraiso. J’ai l’impression qu’une porte s’est ouverte devant moi et que je dois la franchir pour voir ce qu’il y a derrière. Il pourrait bien s’agir d’une drogue d’introduction.