Omnium Gatherum – May The Bridges We Burn Light The Way

Omnium Gatherum : un mélange ordonné de virtuosité mélodique

Le terme « Omnium Gatherum », qui fusionne racines latines et anglaises pour évoquer un joyeux fouillis englobant tout et n’importe quoi, semble à première vue détonner avec le style du groupe finlandais de death mélodique. Pourtant, loin du chaos, Omnium Gatherum nous a toujours surpris par une précision musicale d’une virtuosité remarquable. En novembre 2025, la formation sort enfin son dixième opus pour le grand public, réaffirmant sa domination incontestée dans le death mélodique à la sauce finlandaise.

Une virtuosité éclatante

Fidèle à sa tradition, le disque s’ouvre sur un morceau instrumental. Dès les premiers sons, l’empreinte caractéristique d’Omnium Gatherum se dessine nettement. Des accords de synthétiseur captivants lancent les hostilités, vite relayés par la guitare signature de Markus Vanhala, véritable pilier du son du groupe. Cette ouverture pose le ton : un voyage épique, riche en mélodies, teinté de rétro, mais ancré sans équivoque dans le death metal.

Cette ambiance se concrétise dès « My Pain », qui débute par un solo de guitare d’inspiration néoclassique, porté par une rythmique de batterie ferme, énergique et effrénée. Comme sur ses précédents efforts, May The Bridges We Burn Light The Way brille par sa prouesse technique. Les riffs guitare y sont rythmés, percutants, presque lyriques, imprégnés d’influences heavy qui confèrent au groupe son attrait unique. On décèle aussi une touche locale : le début de « Ignite The Flame » rappelle irrésistiblement les compatriotes d’Amorphis, soulignant cet art subtil de lier traditions et innovations.

Tout au long de l’album, les claviers envoûtants d’Aapo Koivisto injectent une atmosphère rétro et immersive. Cela se remarque particulièrement dans l’introduction de « The Last Hero », où l’on perçoit un écho clair avec Cemetery Skyline. Sans les textures synthétiques de Koivisto, le timbre d’Omnium Gatherum perdrait de son essence : ses nappes harmonieuses amplifient les solos de guitare, insufflant une profondeur à la fois irrésistible et hypnotique.

L’élan du disque s’appuie aussi sur la section rythmique infaillible d’Atte Pesonen à la batterie. Dynamique, véloce et minutieuse, elle démontre une fois de plus son efficacité implacable de bout en bout. L’opposition entre les lignes mélodiques des guitares et le tempo fougueux de la batterie forge une tension idéale, illustrant la expertise d’Omnium Gatherum à fusionner force brute et finesse harmonique.

Des oppositions harmonieuses

L’un des atouts sonores phares du groupe réside sans conteste dans la voix rauque, imposante et profonde de Jukka Pelkonen. Son timbre distinctif imprègne l’ensemble avec une assurance remarquable, alternant fureur et douceur, et insufflant une énergie magnétique à chaque piste. Il a d’ailleurs peaufiné son travail sous la houlette de son homologue suédois Björn « Speed » Strid de Soilwork, dont l’empreinte résonne à travers l’opus.

Cette intensité est toutefois tempérée par les harmonies claires et éthérées de Markus Vanhala. Cette dualité vocale ancre pleinement le groupe dans l’univers du death metal mélodique. Les deux registres s’entremêlent avec fluidité et s’expriment de manière complémentaire au fil des chansons, générant un équilibre subtil entre robustesse et aérien.

« The Darkest City » illustre parfaitement cette dualité : le rythme s’alanguit, et bien que la voix de Jukka Pelkonen conserve sa vigueur, l’atmosphère vire à l’introspection. On frôle ici une ballade typique d’Omnium Gatherum : un titre accrocheur, imprégné d’une charge émotionnelle profonde et enveloppante.

Un portrait du tumulte moderne

Sur cette ossature sonore irréprochable, Omnium Gatherum tisse un album presque thématique, reflet du désordre ambiant de notre époque. Chaque piste agit comme un instantané, capturant des fragments de vie citadine : songes, tensions ou errances solitaires. Ainsi, le groupe brosse un tableau sincère de l’angoisse qui nous submerge parfois.

Cependant, une lueur d’optimisme persiste toujours. Tel que suggéré par le titre May The Bridges We Burn Light The Way, les liens rompus peuvent illuminer la voie, nous poussant à tirer des leçons du passé pour avancer. C’est un discours encourageant : un encouragement à persévérer, à résister au pessimisme et à cultiver la solidarité dans l’adversité.

Cette notion d’unité se reflète aussi dans la musique. Les arrangements et le mixage sont d’une cohérence exemplaire, rendant l’écoute en continu presque inévitable. Les segments instrumentaux en ouverture et en clôture renforcent cette circularité, conférant à l’ensemble une architecture fluide et millimétrée.

May The Bridges We Burn Light The Way s’impose comme un triomphe. Omnium Gatherum y décline sa recette signature de death mélodique sans viser une rupture radicale. Le résultat est un ensemble solide, à la fois chantant et musclé, d’une technique bluffante. Seul bémol : sa brièveté, avec neuf morceaux pour une quarantaine de minutes. Mais cette économie narrative se mue en atout : l’album va à l’essentiel, frappe fort à chaque instant et laisse une empreinte persistante qui incite à une écoute répétée.

Infos pratiques
Label : Century Media Records
Date de sortie : 07/11/2025
Site web : omniumgatherum.org

Nos coups de cœur
Walking Ghost
Phase
The Darkest City
Ignite The Flame